Accro à la vodka à 14 ans : comment se guérir d'une situation de dépendance ?

Tara Schlegel | 14 décembre 2022

Tabac, alcool, drogues, jeux de hasard, écrans, cannabis, pornographie... les conduites addictives touchent tous les milieux et tous les âges. Mais les jeunes constituent une cible particulièrement vulnérable. Reportage dans un service d'addictologie à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière.

Les jeunes ont toujours aimé jouer avec le feu et développer des pratiques à risque. Mais certains comportements sont estimés plus dangereux que d’autres, pour le jeune lui-même ou ses proches. Ainsi l’usage de substances psychoactives, la consommation de produits licites mais toxiques ou générant une forte dépendance font l’objet d’une politique de prévention toujours plus ciblée.

Afin de mieux connaître ces comportements, l’Observatoire français des drogues et autres tendances addictives (OFDT) mène régulièrement des enquêtes sur la population française, et singulièrement sur les jeunes. Les derniers « chiffres clés » ont été publiés en 2022, mais l’OFDT met en garde contre la marge d’erreur qui existe et qui avoisine les 5%. Néanmoins, leurs estimations qui sont issues des enquêtes de Santé Publique France et de travaux menés en interne donnent des indications précieuses. Alcool, tabac, cannabis, héroïne, jeux d’argent et de hasard et désormais écrans, les addictions peuvent être très variées. Il est intéressant, par ailleurs de recouper les chiffres de l’OFDT avec ceux de la Fondapol qui, en 2018 a mené une enquête sur le même sujet auprès des 14-24 ans.

Ainsi, l’Observatoire des drogues estime qu’en France 8,4% des adolescents de 17 ans déclarent consommer régulièrement de l’alcool. La Fondapol, elle, trouve des chiffres un peu plus élevés. 12% des 14-24 ans déclarent consommer de l’alcool plusieurs fois par semaine. Même s’ils ne sont que 5% chez les 14-17 ans puis 13% chez les à peine majeurs.

Toujours à 17 ans, d’après l’OFDT, un quart pratiquement des jeunes, fument quotidiennement du tabac. 26,3% des garçons contre 23,8% des filles. La Fondapol montre, quant à elle, que 5% des 14-17 ans sont des fumeurs réguliers, tout comme 15% des 18-22 ans. Le chiffre grimpe ensuite très vite pour atteindre 27%

Quant au cannabis, 41% des garçons de 17 ans l’ont expérimenté, contre 36% des filles du même âge. Et presque 10% des garçons et 4,5% des filles encore mineurs en font un usage régulier. Les chiffres sont assez proche, dans l’enquête que la Fondapol a menée sur un millier de jeunes. 5% des moins de 18 ans disent fumer du cannabis au moins une fois par mois. Ils sont le double entre 14 et 24 ans. La particularité étant que le chiffre grimpe à 25% en région parisienne (contre 8% dans les campagnes).

Enfin, 0,8% des enfants de 17 ans ont expérimenté l’héroïne, quand ils sont presque 39% à avoir joué à des jeux d’argent, assure la Fondapol.

Dernière addiction importante les médicaments, qui sont consommés par 16% des jeunes filles de 17 ans pour les tranquillisants, 11% pour les somnifères et 7% pour les antidépresseurs.

Et puis la Fondapol a enquêté sur les écrans, décrits comme « le tsunami qui vient ». En Effet 26% des moins de 22 ans disent jouer plus de 5 heures par jour.

L’addiction aux écrans, le tsunami qui vient !

Copyright :

Fonds Actions Addictions, Fondation Gabriel Péri et Fondation pour l’innovation politique – juin 2018

Dans ce contexte, l’Etat a mis en place des consultations d’addictologie, comme celle qui se trouve à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière. Dirigée par Nicolas Bonnet, cette consultation se trouve dans le service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent du Professeur David Cohen – qui est le plus important de France. Dans une toute petite salle de consultation, Nicolas Bonnet reçoit donc les jeunes gens et les jeunes filles de 12 à 25 ans. Deux après-midi par semaine, il accueille les patients avec leurs parents la plupart du temps. L’entretien dure entre 45 minutes et une heure. Souvent, les parents sont conviés, au moins au début de la séance et à la fin, quand le jeune est invité à résumer les décisions qu’il a prises au cours de sa conversation avec Nicolas Bonnet.

« Tous les jeunes adhérent à l’idée du changement »

Docteur en pharmacie, spécialisé en santé public et addictologie, responsable de cette consultations depuis une quinzaine d’années, Nicolas Bonnet cherche à favoriser, chez le jeune, des changement de comportement. Pour cela, il utilise l’entretien motivationnel qui a, dit-il, fait l’objet de beaucoup d’évaluations et la « preuve de son efficacité dans le domaine des addictions, de la santé mentale ou des troubles du comportement -notamment alimentaire ».

Ainsi lors des entretiens, Nicolas Bonnet cherche à renforcer le sentiment d’efficacité personnelle des jeunes patients, l’estime de soi, qui permet ensuite de favoriser l’autonomie et l’envie de changement. La plupart des jeunes, lorsqu’on leur laisse suffisamment de latitude pour choisir le rythme et les moyens de leur progression, adhèrent à l’idée de changer. Comme Adèle, cette jeune fille, qui a aujourd’hui 17 ans et qui maîtrise parfaitement sa consommation.

Pourtant à l’âge de 14 ans, elle a commencé à boire de la vodka, d’abord avec modération, ensuite, progressivement, plusieurs fois par semaine :

« A 14 ans, j’ai commencé à boire de l’alcool, c’était facile de s’en procurer. Je consommais 25 à 50 cl de vodka par jour du vendredi au dimanche »

Grâce à ses conversations avec Nicolas Bonnet et grâce à sa force de caractère, Adèle a réussi à surmonter sa dépendance.

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