Chine : Les émotions au service de l’intelligence artificielle
19 septembre 2018
La course à l’intelligence artificielle (IA) continue de faire rage entre les États-Unis et la Chine. En juillet 2017, dans le cadre du Plan pour le développement de la prochaine génération d’intelligence artificielle, le Conseil des Affaires d’Etat a établi une stratégie prometteuse[1]. D’ici 2020, la Chine espère ainsi rattraper son retard sur les États-Unis, les dépasser en 2025 et finalement imposer son leadership en la matière dès 2030. Dans le sillon de cette course à l’innovation à l’échelle mondiale, le gouvernement de Xi Jinping investit massivement dans le domaine de la reconnaissance faciale.
Le Parti communiste chinois recourt à d’importantes levées de fond avec l’aide des géants d’internet tels qu’Alibaba, Baidu et Tencent. En avril dernier, Alibaba a d’ailleurs participé à la plus grosse levée de fonds, soit environ 488 millions d’euros[3]. Cette dernière est, selon ses fondateurs, la société la plus valorisée parmi l’ensemble des start ups chinoises qui travaille sur « l’apprentissage profond », soit le fameux deep learning[4].Connue pour son partenariat technologique avec les principaux fabricants de mobiles chinois tel que Huawei, l’entreprise exporte aussi ses technologies dans les domaines de la finance, la sécurité, le marché automobile, l’e-santé et l’éducation. Son produit phare sont ces caméras, adaptées à l’environnement dans lequel elles sont installées et capable de mesurer les faits et gestes des individus.
Les systèmes de reconnaissance faciale se multiplient et envahissent ainsi la vie quotidienne des Chinois par la surveillance des lieux publics, des fast-foods, des banques, et jusqu’aux distributeurs de papier toilette ! Le pays met actuellement en place le système de caméras de surveillance le plus sophistiqué au monde. Il a déjà installé quelque 170 millions de caméras nourries à l’intelligence artificielle et en prévoit trois fois plus d’ici 2020.
Les établissements scolaires sont également visés : selon un journal local, un lycée de la ville d’Hangzhou, a expérimenté un « système intelligent de gestion des comportements en classe », une sorte de smart eye capable d’analyser la concentration des élèves[5]. Situé au-dessus des professeurs, cet « œil numérique bienveillant » analyse les émotions des élèves à travers leurs traits et expressions de visage. Il peut ainsi indiquer, en temps réel, à l’enseignant si l’élève est heureux, déconcentré, agité, anxieux ou encore s’il se sent concerné par la leçon en cours. L’objectif affirmé d’un tel système est d’aider les enseignants dans leurs démarches pédagogiques, d’encourager l’implication des élèves en classe et de pouvoir recenser rapidement les présents et les absents.
En pleine croissance, le marché de la reconnaissance faciale a dépassé le milliard de yuans (128 millions d’euros) en 2016 et devrait être multiplié par cinq d’ici 2021, selon une étude du cabinet Analysys.
Julie NOYER
[1]Voir « Plan de développement de la prochaine génération d’intelligence artificielle », Conseil des Affaires d’Etat de la République populaire de Chine, Juillet 2017.
[4] https://www.sensetime.com/ourCompany
[5] http://www.globaltimes.cn/content/1102569.shtml
Aucun commentaire.