
La menace de la droite extrême
Gérard Courtois | 19 avril 2011
Malheureusement, les résultats des élections en Finlande, dimanche 17 avril, auront consolidé un peu plus encore l’analyse de Dominique Reynié la vague populiste menace chaque jour davantage une Europe vieillissante, frileuse et inquiète. Avec 19 % des voix, le parti des Vrais Finlandais, xénophobe et eurosceptique, y a réalisé une percée spectaculaire et fait désormais jeu égal avec les conservateurs et les sociaux-démocrates. A l’instar des mouvements enregistrés, depuis une dizaine d’années surtout, dans des pays aussi divers que la Norvège et la Bulgarie, l’Autriche et la Hollande, la Suisse, la Hongrie ou la France. Au total, 27 partis de droite extrême quand ils ne sont pas ouvertement d’extrême droite, ont acquis une influence significative dans 18 pays européens. C’est ce phénomène d’ensemble que le directeur général de la Fondation pour l’innovation politique s’emploie à explorer et à comprendre, pour mieux mettre en garde contre le danger qu’il représente. Sans s’encombrer de débats théologiques, il entend par populistes ces mouvements qui ont fait de la protestation, de la xénophobie et de la dénonciation des élites leur fonds de commerce. Mais il s’agit, pour l’auteur, d’un populisme «d’un type nouveau, un populisme patrimonial fondé sur la défense conservatrice et virulente d’un patrimoine matériel (le niveau de vie) et d’un patrimoine immatériel (le style de vie) ». Tout contribue à l’alimenter. La globalisation ne conduit pas seulement au triomphe du marché contre l’Etat régulateur et protecteur sur lequel était bâti le modèle européen, d’inspiration socialdémocrate, depuis des décennies, il fait naître, également, la crainte du déclassement, individuel autant que collectif
Dénégation
Le vieillissement et l’affaisse ment démographique de l’Europe ne sont pas moins déstabilisants. Ils ont fait de l’Union européenne le «premier pôle migratoire du monde» et y ont introduit, peu à peu, deux formes de contentieux le premier, «économique et social porte sur les questions d’emploi et de salaire », le second, culturel, voit les immigrés – en particulier musulmans – accusés de menacer les identités nationales. Les mouvements populistes font leur miel de ce profond changement de décor démographique «Le passage d’un contentieux éco nomique à un contentieux culturel » leur permet d’élargir fortement leur assise sociologique et politique. En outre, la complexité de ces questions et la crainte d’alimenter discours et considérations racistes ont conduit les élites politiques à esquiver ces réalités. Cela n’a fait qu’attiser le soupçon d’une dénégation et nourrir un peu plus les réflexes xénophobes. Une forte dose de refus de toute augmentation des impôts complète le tableau. Dominique Reynié décrit fort bien, enfin, la menace qu’exercé ce populisme à la fois sur la social-démocratie et sur la droite de gouvernement, concurrencée sur le terrain «du conservatisme matériel et identitaire » La droite, estime-t-il, n’est pas assurée de remporter cette compétition «car les assises électorales du populisme patrimonial sont potentiellement beaucoup plus larges que celles de l’extrême droite classique » Rude leçon pour l’Europe, rude conclusion, également, en France dès lors que la majorité entend concurrencer le Front national sur son propre terrain.
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