Le libéralisme est il soluble dans l'union des droites ... et réciproquement ?

Gabriel Robin | 26 juin 2025

Cinq ans après la Convention de la droite, le Sommet des Libertés marque un nouvel épisode dans la quête d'un rassemblement politique à droite. Autour d'un thème fédérateur "les libertés" et sous l'égide d'organisations proches de l'entrepreneuriat libéral, ce rendez-vous a réuni des figures aussi diverses que Jordan Bardella, Éric Ciotti, Marion Maréchal ou encore Alexandre Jardin. Mais au-delà de l'affichage, l'union des droites reste tiraillée entre libéralisme, conservatisme et tentations populistes. Pour Christophe Boutin, ce rassemblement se construit moins autour du libéralisme économique que d'un attachement commun aux libertés plurielles, locales ou individuelles. Erwan Le Noan, plus sceptique, souligne les fractures profondes entre libéraux et extrême droite, et rappelle que le RN reste antilibéral dans ses principes économiques comme dans sa conception de la liberté. Entre convergences tactiques, divergences doctrinales et méfiance mutuelle, la recomposition à droite est tout sauf acquise.

Erwan Le Noan : Trois raisons au moins peuvent faire échouer ce projet. D’abord, les divergences profondes qui existent, en réalité, entre le RN et les libéraux ou les conservateurs. Les sujets économiques sont évidents : le RN a un programme qui n’est ni libéral, ni réformateur. Il est plus proche de la gauche que de la droite française et encore plus des droites européennes. Les questions politiques en sont d’autres : l’extrême-droite ne soutient la démocratie qu’en ce qu’elle permet l’expression du peuple, mais elle ne semble pas avoir un respect inconsidéré pour la séparation des pouvoirs, le pluralisme, les procédures qui fondent l’Etat de droit. Elle critique l’étatisme mais une bonne partie de son discours consiste en réalité à plaider pour remplacer la mainmise d’une idéologie qu’elle conspue par la sienne. Ensuite, si les libéraux ou les conservateurs savent s’organiser et œuvrer pour montrer que la réforme est possible, ils ont un boulevard électoral devant eux : la France est majoritairement « à droite » (voir l’étude de la Fondapol en 2022). Il leur faut donc travailler plus et gagner confiance dans leur capacité de conviction. Enfin, l’extrême-droite garde aujourd’hui un discours qui tient de la révolte, du populisme : elle inquiète. Elle reste entourée d’un halo de désordre et de brutalité. A la droite de montrer qu’elle saurait réformer dans l’ordre. En outre, elle inquiète en matière économique : son programme est dépensier et souffre d’une grave absence de cohérence. Dans ce domaine, son arrivée au pouvoir sera un grand saut dans l’inconnu, ce qui n’est évidemment pas de nature à rassurer ni les Français, ni les marchés.

Lire l’échange entre Erwan Le Noan, membre du Comité scientifique et d’évaluation de la Fondapol, et Christophe Boutin, politologue et professeur de droit public à l’université de Caen-Normandie sur atlantico.fr

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