A Taiwan, un système de santé exemplaire
Paul Laurent | 14 octobre 2014
L’efficacité du système de santé taïwanais
Par @PaulLaurent
En 2015, Taïwan se prépare à célébrer le 20ème anniversaire de la création du National Health Insurance (NHI). Ce système de couverture universelle des soins de santé, créé en 1995 à un moment où 40% de la population insulaire ne disposait d’aucune assurance santé était une véritable révolution ; son succès démontre qu’il est possible d’associer une couverture universelle avec des soins médicaux de qualité et une maîtrise raisonnable des coûts.
Le NHI a été instauré en 1995 afin de permettre à l’ensemble de la population taïwanaise de bénéficier d’une couverture médicale minimale, à commencer par les enfants, les personnes âgées et les chômeurs qui ne bénéficiaient jusqu’alors d’aucun régime spécifique. Pour un pays qui avait misé son développement économique sur son capital humain, cette grande réforme s’imposait. Malgré quelques critiques et faiblesses du dispositif, force est de constater que le NHI a été une grande réussite. Le taux de satisfaction avoisine les 70%, un taux que l’on retrouve dans peu de grands pays développés.
Aujourd’hui, le système couvre 99,6% de la population. La prise en charge est à la fois presque gratuite (une quote-part entre 10 et 20% permet de lutter contre les dérives et abus de la gratuité – autour de 100 NTD soit 2,5 dollars pour une consultation) et très large, son champ d’application allant de l’acuponcture aux soins dentaires, en passant par la médecine chinoise. Le système mis en place est celui du payeur unique. Le gouvernement prélèvent des cotisations sur les salaires (5% environ dont la majeure partie est assurée par l’employeur) tout en assurant un filet de sécurité à ceux qui ne cotisent pas pour bénéficier du NHI.
Elle présente en outre certains avantages rares dans les sociétés occidentales. Le système d’accès et de services est performant et égalitaire en terme de couverture du territoire. Les coûts sont relativement faibles : si les dépenses de santé représentaient 4,79% du PIB avant la réforme, elles ne représentent que 6,9% du PIB en 2012 (contre 15% aux Etats-Unis). Loin de l’explosion redoutée. Cette maîtrise des coûts s’explique par des coûts administratifs relativement faibles (1,5% du montant total du NHI, le plus faible ratio des sociétés occidentales). Le système est entièrement électronique, « paperless », donc simple, transparent et centralisé, chaque taïwanais disposant d’une smart card.
Une autre caractéristique du modèle taïwanais est la logique de concurrence entre les services de soin, une majeure partie d’entre eux relevant du secteur privé, une compétition qui ne joue pas tant sur les prix (ceux-ci étant plus ou moins contrôlés par le gouvernement) que sur la qualité des services, dans la mesure où les taïwanais sont libres de choisir leur centre médical. Les taïwanais disposent donc d’un service de qualité (les médecins ont souvent étudié aux Etats-Unis ou phénomène plus fréquent encore, au Canada) et peu encombré ; un taïwanais qui veut consulter un dentiste ou un ophtalmologiste peut le faire le jour même.
Ainsi, le système taïwanais est dans la droite ligne des systèmes canadiens ou encore australiens ; il n’a rien inventé, mais il l’a fort bien et fort vite appliqué. Dans le cadre d’un système de payeur unique et d’une couverture santé universelle, il met en place une concurrence entre fournisseurs de soin publiques et privés entre lesquels les taïwanais sont entièrement libres de choisir. Cela pousse la productivité, la qualité des soins et l’offre de soin à la hausse. Tout en gardant une certaine maîtrise des coûts. Sans être optimal, le système taïwanais est une réussite. Reste à savoir s’il relèvera le défi du vieillissement rapide de sa population.
Crédit photo : Aikawa Ke
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