Ciudadanos, nouvel acteur du jeu politique espagnol
Fatoumata Cissé | 23 avril 2015
Ciudadanos, nouvel acteur du jeu politique espagnol
Par Fatoumata Cissé
Le 20 décembre prochain auront lieu les élections générales espagnoles, qui détermineront le futur gouvernement. Un avant-goût de ce scrutin avait lieu en janvier dernier lors des élections régionales en Andalousie, avec en surprise la troisième place décrochée par le parti centriste Ciudadanos (Citoyens – Parti de la Citoyenneté).
Fondé en 2006, le mouvement citoyen porte une conception libérale de la politique économique et sociale, centrée sur l’économie de la connaissance, l’union de la Nation, et l’élaboration de réformes pragmatiques et novatrices. Sa direction est assurée par son fondateur Albert Rivera (avocat catalan), qui est depuis quelques mois l’un des leaders politiques les plus en vogue d’Espagne. Incarnant le renouveau, le dynamisme, et l’audace qui manquaient à la classe politique espagnole depuis la crise de 2011, l’ancien champion de natation a réussi à séduire un électorat en quête de nouvelles ambitions pour le pays.
Ciudadanos a fait soudainement irruption dans la course électorale, en bouleversant tous les sondages, porté par un fort soutien populaire : 53% de la population approuve la candidature de son leader. Le parti représente une alternative aux deux principales familles politiques (le Partido Popular de droite et le Partido Socialista Obrero Español de gauche), et défie l’ambition du mouvement des indignés de gauche (Podemos) d’être la 3ème force politique du pays : pour Albert Rivera, Podemos est un « nouveau parti avec de vieilles idées », qui a une optique « révolutionnaire », tandis que Ciudadanos prône une approche constructive et « évolutionniste ».
Sur le plan économique, le parti souhaite le renforcement des relations entre les universités et les entreprises, principalement dans le domaine technologique. Au cœur de son programme, Albert Rivera porte l’ambition de promouvoir l’émergence des start-up (en baissant les coûts administratifs et les impôts) et de soutenir l’innovation, qu’il entend privilégier aux lourds et coûteux investissements en infrastructures. Il propose ainsi de rediriger un tiers des dépenses annuelles du transport ferroviaire vers la création de centres de recherche de nouvelles technologies. L’ambition claire du projet citoyen est d’encourager l’esprit entrepreneurial et la recherche et développement. Avec un programme libéral clairement affiché, le parti attire des électeurs en quête de renouveau et bénéficie d’un large soutien de la part des entrepreneurs.
La politique sociale de Ciudadanos est organisée autour de cinq grands axes : la citoyenneté, la liberté et l’égalité, la laïcité, le bilinguisme, et la souveraineté de la Nation. Ces derniers préceptes sont au cœur des débats, notamment au sujet de l’indépendance de la Catalogne. Albert Rivera y est totalement opposé (en dépit de ses origines catalanes) car il considère que le morcellement d’un pays et le sentiment d’indépendance, accentuent la « corruption » et l’apparition de « crises ».
Même si son ascension est fulgurante dans cette campagne législative, le parti est aussi victime de son esprit novice : la presse a relayé le scandale provoqué par l’un de ses jeunes adhérents, qui portait des discours anti-catalans et xénophobes sur les réseaux sociaux. Il n’en reste pas moins qu’il pourrait créer la surprise : avec des élections qui semblaient déjà acquises à l’égard d’un « classico » entre le parti conservateur Partido Popular et le Partido Socialista, Ciudadanos vient briser les règles du jeu, et conforte sa place d’outsider, avec qui il faudra probablement opérer des alliances pour emporter le Parlement en fin d’année.
Crédits photo : Carlos Delgado / Wikipedia
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