"El Caso Gurtel" : la crise qui a secoué la droite espagnole
Jean Freysselinard | 01 juillet 2014
« El Caso Gurtel » : la crise qui a secoué la droite espagnole
Caisse noire, double comptabilité, soupçons d’enrichissement personnel au sein du Parti populaire espagnol. Retour sur l’affaire qui a secoué la droite espagnole.
Il s’agit en réalité des affaires Gürtel et Barcenas qui ont défié la chronique pendant de longs mois au-delà des Pyrénées. Le scandale commence en mai 2009 avec le placement en détention provisoire de Francisco Correa, un chef d’entreprise accusé d’avoir bénéficié d’un traitement de faveur dans l’octroi de marchés à des entreprises d’événementiel. L’ensemble des sommes mises en cause s’élève à 43 millions, renvoyant l‘affaire Bygmalion et ses 33[1] millions à une affaire de second rang. Le scandale emporta dans son sillage des députés et sénateurs du Parti populaire espagnol mais également plusieurs grandes personnalité locales telles que le Président de la Communauté autonome de Valence ou encore un maire-adjoint de la ville de Madrid.
A l’affaire Gürtel succéda le cas Barcenas. M. Barcenas, sénateur et trésorier du Parti populaire, fut accusé de tenir une comptabilité double et non déclarée à la Commission nationale des comptes de campagne (Hacienda Pública española). Les soupçons qui pèsent sur l’UMP aujourd’hui y ressemblent fort avec un système de facturation destiné à contourner le plafond des dépenses de campagne de l’élection présidentielle de 2012. Fausses factures, favoritisme, comptabilité cachée, déclarations tonitruantes dans la presse d’un trésorier qui s’estime lâché par son chef, soupçons de gratification illégales par une société des cadres du parti, les points communs sont nombreux entre les difficultés que connait actuellement l’UMP et celles qu’a connu avant lui le Parti populaire espagnol.
Deux différences majeures méritent toutefois d’être signalées. La première est à rechercher dans le contexte politique. Alors que la droite française porte la voix de l’opposition parlementaire, le Parti populaire espagnol a connu pendant ces affaires une situation de pouvoir hégémonique comparable à celle du Parti socialiste français en 2012 : contrôle des deux chambres du Parlement et de la quasi-totalité des collectivités territoriales. Si, l’Andalousie et les Asturies ont résisté en Espagne à la vague bleue, c’est l’Alsace qui en France s’est maintenue à la surface face à la vague rose.
La deuxième différence majeure réside dans les accusations portées à l’encontre des protagonistes de ces affaires. Alors qu’en Espagne la justice s’est penchée sur des cas de corruption et de fraude fiscale aucun de ces deux critères n’a été retenu dans l’affaire Bygmalion dont l’instruction par la justice est aujourd’hui en cours.
Alors scénario à l’espagnole pour l’UMP ou scandale politique limité ? Quoi qu’il en soit, ces affaires marqueront cette famille politique comme elles l’ont fait pour le Parti populaire espagnol qui a dû affronter une longue crise interne dont il ne s’est toujours pas réellement remis. Les dernières élections européennes en ont été une nouvelle démonstration avec un choc fort pour le PPE qui n’a obtenu que 26% des voix contre 43% en 2009 et en 2004.
De son côté, le parti d’opposition de gauche (le PSOE) n’a pas tiré profit de la situation avec un sévère recul électoral aux dernières élections européennes (23 % des suffrages exprimés en 2014 contre 39,3 % en 2009). Peut-être l’explication la plus pertinente est à rechercher du côté de la concurrence de nouveaux labels politiques, notamment à gauche, à l’instar du mouvement « Podemos » (7,2 % des voix aux élections européennes) ?
Twitter : @jfreysselinard
Crédit photo : ssoosay
[1] Source : « Les 15 chiffres fous de l’affaire Bygmalion » Le Monde, 25 juin 2014
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