Logement : « la Paille et l’Épine » socialiste
Pierre-Henri Bovis | 29 avril 2015
Logement : « la Paille et l’Épine » socialiste
Par Pierre-Henri Bovis
Les 41,3 milliards d’euros de dépenses publiques n’ont pas permis à l’État de relancer le secteur du logement. Le marché immobilier est piégé par un terrible effet de ciseaux avec d’un côté l’inflation législative de ces dernières années et de l’autre les contraintes réglementaires qui pèsent lourdement sur le budget des collectivités territoriales. Face aux aléas et difficultés qu’elles induisent, les pouvoirs publics se retrouvent bloqués par leurs propres causes.
Les maires considèrent aujourd’hui que « l’État n’a pas à mettre sous tutelle les mairies, encore moins leurs administrés concernant la loi SRU » (J-C Fromantin, maire de Neuilly et E. Raoult maire du Raincy – Atlantico) tandis que le spécialiste du logement à l’association CLCV David Rodrigues dénonce la loi ALUR comme étant « un très mauvais signal donné au secteur locatif ». Le secteur du logement est en crise et les réponses au problème tardent à venir.
Un article paru dans Le Parisien le 7 avril 2015 décrit comment l’État veut relancer ce secteur avec un projet de construction de 200.000 logements sur 36 sites en Île-de-France. Face à la difficulté des communes de répondre aux nombreuses demandes de logements, la nouvelle ne peut être que bien accueillie. Pourtant, des questions essentielles et d’ordres démocratiques sont posées face à cette manoeuvre juridique. Car la démocratie semble bien être en ce moment l’épine quotidienne.
C’est au nom d’une opération d’intérêt national (OIN) que l’État parvient aujourd’hui à s’imposer comme seul partenaire de discussion, sans débat ni procédure accélérée. Il se dote en effet d’un cadre juridique qui lui permet tout simplement de s’affranchir de toute autorisation des élus locaux. Scandaleux pour les élus de terrain, fraichement investis ou réinvestis en mars 2014 qui voient leurs prérogatives piétinées.
Ce déni de démocratie n’est évidemment pas sans conséquences. Il faut stopper au maximum la ghettoïsation de nos quartiers pour privilégier une vraie mixité sociale, promouvoir l’égalité d’accès au logement avec un service public conséquent. Or, ces constructions à la va-vite voulues par le gouvernement ne peuvent entrer dans le cadre d’un développement équilibré « logements-emplois-transports ».
Car qu’en est-il du service à la population? Qui dit « logements », dit « écoles », « stationnement », « transports », « commerces », « espaces verts », « services publics », un urbanisme réfléchi, équilibré où le bien-vivre se mesure dans le bien-être. Un urbanisme où les élus de terrain à l’écoute de leurs administrés sont comptables de leurs actes. Penser le territoire du XXème siècle, c’est penser en même temps l’optimisation des dépenses publiques et la proximité entre élus et administrés. La fracture territoriale creusée entre plusieurs collectivités doit avoir pour conséquence un renforcement du pouvoir des collectivités … et non l’inverse !
Faut-il à ce point oublier les erreurs du passé, revivre le cauchemar d’un urbanisme sans concertation pour en dénoncer plus tard sa ghettoïsation ? Pour lancer de vastes projets de construction, il faut un plan global prenant en compte les enjeux locaux des différentes collectivités territoriales. Avant de vouloir construire manu militari, essayons déjà de nous pencher sur les presque 10.000 mètres carrés de logement inoccupés à Paris.
La qualité de vie des franciliens est très discutable et se détériore de jour en jour. Entre le bétonnage voulu par l’État et les pics de pollution non maitrisés par les élus, les habitants de notre région Île-de-France s’insurgent et se détournent de la vie publique. L’abstention massive des électeurs en est l’une des conséquences. Il serait singulier, sous l’impulsion politique, de les voir quitter cette région à la recherche d’un cadre de vie que les décisions d’aujourd’hui auraient balayé d’un revers de main politicien.
Crédits photo : Gamut / Fotolia
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