Lois Hartz : non, le modèle allemand ne génère pas plus de précarité !

Fondapol | 17 juillet 2014

 17.07.20143Lois Hartz : non, le modèle allemand ne génère pas plus de précarité !

Par @L_ThinkLiberal

L’explosion supposée de la pauvreté et des inégalités en Allemagne a été et reste le principal argument des opposants aux réformes dite « lois Hartz », notamment en France. Est-ce réellement le cas ?

Les lois Hartz sont des réformes du marché du travail mise en place en  Allemagne entre 2003 et 2005 (allocation chômage pendant 12 mois et non plus 32 mois, minijobs, formation professionnelle…).  Aujourd’hui, 15,2% des Allemands seraient pauvres (la formulation exacte est « en risque de pauvreté»)[1] contre environ 14% des Français. Mais, justement, comment détermine-t-on si une personne est pauvre ?

En Europe, une personne est dite pauvre si ses revenus s’élèvent à moins de 60% du revenu médian national.  Il s’agit d’une définition relative de la pauvreté qui en dit finalement peu sur les capacités de consommation, d’accès au logement ou à l’éducation de qualité. Dans le cas de l’Allemagne, on détermine le seuil de pauvreté à partir de la moyenne pondérée en population des revenus médians des Länder. Le seuil de pauvreté est alors estimé à 60% de ce revenu.

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Les revenus des habitants des Länder de l’ancienne Allemagne de l’Est (communiste) sont comparés à une moyenne dont ils ne représentent en poids que 20%. Dans ces régions, pour des raisons historiques et non pas du fait des lois Hartz, le niveau des salaires est nettement plus faible qu’en Allemagne de l’Ouest : le revenu moyen disponible dans l’ancienne Allemagne de l’Est s’élève en 2013 à 16 979 contre près de 20 521 € à l’ouest. Il s’agit d’un écart de 20%. Ainsi, par construction, un nombre important d’habitants des nouveaux Länder se retrouve catégorisé comme pauvre sans tenir compte des différences de coût de la vie et de logement qui peuvent exister. 30% des pauvres au sens européen vivent dans ces régions [1]où seul 20% de la population totale est installée.

Finalement, une plus grande proportion de personnes « à risque de pauvreté » en Allemagne qu’en France peut s’expliquer par la méthode de calcul et des raisons historiques. Il s’agit bien de personnes à risque et donc pas nécessairement de précarité quotidienne. Il est donc intéressant de se demander si “les pauvres par définition statistique“ en Allemagne vivent mieux ou moins bien qu’en France et si leur situation s’est détériorée.

Niveau de vie et précarité

Depuis les réformes Hartz le sous-total des personnes joignant les deux bouts « avec difficulté » a chuté de 24,1% alors qu’il a augmenté de 4,3% en France[2]. Il y a donc de moins en moins de personnes en difficulté financière en Allemagne, indiquant un recul de la précarité vécue.

Pour mesurer le niveau de vie, il est  pertinent de raisonner en PPA. En effet, tout comme une personne ne vit pas de la même manière avec 999€ à Paris ou en Corrèze, une personne ne vit pas de la même manière avec 999€ en France et 952€ en Allemagne. Alors que la différence entre le seuil de pauvreté français et le seuil allemand est de 5%, la différence de prix du m2 en France (sans compter Paris) et en Allemagne dans l’ancien en 2010  était de 50 % selon l’OCDE.

En PPA, le revenu disponible quel que soit le groupe social est supérieur en Allemagne, indiquant un niveau de vie plus élevé. Les données ont été compilées par Alain Fabre de l’Institut de l’entreprise [2]  :

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Autrement dit, les pauvres en Allemagne ne vivent pas moins bien et peut-être même mieux qu’en France.

Inégalités.

Une autre critique adressée aux réformes Hartz est celle de la croissance des inégalités. L’évolution des inégalités en Allemagne est similaire à ce qui a été observé dans le reste du monde occidental et ne peut être attribuée aux réformes mises en place d’autant plus que depuis 2006 le coefficient de GINI est stable. [3]

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Les lois Hartz ont largement contribué à la réduction du  chômage sans pour autant provoquer une hausse de la précarité et de la pauvreté vécue. Elles n’expliquent évidemment pas à elles seules le succès économique allemand. Mais des réformes favorisant l’emploi et la flexibilité en France ne devraient pas être repoussées en invoquant des effets secondaires qui n’ont pas été observés jusqu’à présent en Allemagne.

[1] Chiffre de Destatis, l’INSEE allemand

[2]Données Eurostat

[3][1] The European Observatory on the social situation and demography, network on income distribution, Terry Ward

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