Obama 2012 (2/3) : Républicains cherchent candidat crédible
Fondapol | 27 juin 2011
Le retard à l’allumage du Grand Old Party
Tandis qu’Obama, sans rival dans les primaires démocrates, est déjà engagé dans la campagne pour l’élection présidentielle, les Républicains peinent à se mettre en ordre de bataille. Ce retard a plusieurs causes.
La première est l’avantage dont a joui le Président sortant jusqu’à il y a peu : aucun candidat républicain n’était parvenu à le devancer dans les sondages, il est vrai peu crédibles à ce stade. Cette avance est en train de disparaître.
Désormais, le républicain Mitt Romney l’emporte sur Obama de 3% dans certains sondages. L’opération militaire réussie contre Ben Laden n’a pas durablement immunisé le Président, pas plus que la première guerre en Irak et la capture de Saddam Hussein ne l’avaient fait pour George Bush père et fils. La lenteur des Républicains s’explique peut-être aussi par la focalisation persistante du public sur les enjeux budgétaires et le Congrès plutôt que sur la campagne présidentielle. Or, pour tout candidat potentiel, il est risqué de prendre position sur des sujets aussi brûlants que changeants.
Les divisions des Républicains
Mais l’attentisme des candidats s’explique aussi par l’incapacité des leaders républicains à faire émerger un candidat à la fois hors pair et consensuel, du fait des divisions internes au parti.
Le soufflé des élections législatives est retombé. En devenant majoritaire à la Chambre des Représentants, les Républicains se sont à la fois radicalisés et divisés. Au Congrès comme sur le terrain, le parti est tiraillé entre, d’une part, un establishment qui, pour être conservateur, n’en est pas moins capable de trouver des compromis avec le Président, et, d’autre part, une aile extrémiste du Tea Party doctrinaire, inexpérimentée et portée à la surenchère. Cette poussée vers la droite comporte des écueils.
Nombreux sont les électeurs républicains qui ont manifesté leur opposition à la réforme de l’assurance-santé des retraités (Medicare) soutenue par le parti. Or, les retraités sont un électorat-clé dans plusieurs Etats susceptibles de décider l’élection, comme la Floride et la Pennsylvanie. A l’occasion d’une élection partielle dans l’Etat de New York, les Républicains viennent de perdre une circonscription sûre sur le thème du Medicare. Ces tensions internes freinent l’émergence d’un candidat à la fois crédible et rassembleur face à Barack Obama.
Un candidat issu de la droite populiste conduirait à un échec
La grande hantise des cadres du Parti Républicain est de voir glisser les candidatures et le débat électoral trop à droite.
L’establishment républicain est plus soucieux de la victoire finale que de la pureté idéologique du candidat. Or, le triomphe aux primaires d’un candidat populiste venu de la droite du parti conduirait naturellement à un désastre face à Obama.
Historiquement, les candidats perçus comme extrémistes sont sévèrement battus à l’élection présidentielle. Ce fut le cas de Goldwater en 1964 pour les Républicains et de McGovern en 1972 pour les Démocrates. Pour autant, il n’est pas certain que les électeurs de base du Grand Old Party partagent les réticences de l’establishment. Après s’être entichés du milliardaire populiste Donald Trump, avant qu’il ne se retire, ils placent leurs espoirs en Michele Bachmann, à défaut d’une candidature de Sarah Palin.
La victoire aux primaires républicaines d’un candidat issu de la droite du parti paraît néanmoins peu probable.
Ainsi, Newt Gingrich a mal démarré sa campagne et est lesté de handicaps politiques et personnels; charismatique et bon débateur, il pourrait tout au plus faire sensation dans les débats télévisés. Rick Santorum manque de charisme et séduit surtout les intégristes religieux. Quant à Michele Bachmann, seule candidate attitrée du mouvement Tea Party pour l’instant, elle pourrait en revanche percer dans les caucus de l’Iowa et certaines primaires du Sud, et apparaître comme une alternative redoutable face au candidat modéré qui se détachera.
Mitt Romney, un favori aux nombreux handicaps
En l’absence d’une percée durable de Michele Bachmann ou d’une candidature encore possible du très populaire gouverneur du Texas, Rick Perry, la primaire devrait se jouer entre Mitt Romney, Jon Huntsman et Tim Pawlenty, tous les trois anciens gouverneurs – profil idéal pour devenir Président -, et crédibles pour mener campagne contre Washington et le Big Governement, figures imposées de la rhétorique électorale américaine.
Ancien consultant et financier, ancien gouverneur du Massachusetts, Mitt Romney fait aujourd’hui figure de favori.
Mais c’est en partie la conséquence de sa notoriété acquise grâce sa précédente candidature aux primaires d’il y a quatre ans. Cette campagne lui avait permis de lever les réticences attachées à sa religion mormone. Autres atouts : Romney est riche, capable de lever de l’argent, et bien implanté sur le terrain.
Son principal handicap est d’avoir fait adopter au Massachusetts un système de santé devenu le modèle dont s’est inspiré Obama. Or, peu de sujets unissent et motivent plus intensément les Républicains que l’opposition à la réforme de la santé publique. Il est aussi possible que les liens de Romney avec Wall Street et les restructurations d’entreprises nuisent à son image. Par ailleurs, les intégristes religieux ne le jugent pas crédible car il a changé plusieurs fois de position sur l’avortement et l’homosexualité.
Jon Huntsman, la doublure de Romney
Jon Huntsman est lui aussi un riche homme d’affaires mormon qui fut un temps gouverneur de l’Utah. A l’instar de celle de Romney, sa candidature séduirait un électorat modéré en général bien que plutôt conservateur sur le plan économique et budgétaire. Deuxième point commun avec le favori républicain : Huntsman entretient, aux yeux de la base, un lien trop étroit avec Obama, qui l’a nommé ambassadeur en Chine, poste dont il a démissionné pour se présenter. Il a par ailleurs imprudemment fait l’éloge du Président.
Tim Pawlenty le consensus mou
La candidature de Tim Pawlenty se distingue clairement de celles de Romney et de Huntsman.
Gouverneur du Minnesota jusqu’à cette année, Pawlenty est issu d’un milieu modeste, ce qui lui permet d’incarner le « rêve américain ». Sa personnalité sobre pourrait se révéler être un atout en ces temps de restrictions budgétaires. Son programme économique, fondé sur une forte croissance, correspond au message optimiste qu’attendent les Américains. Si Pawlenty est rarement le premier choix des électeurs des primaires, il est clairement le meilleur second choix pour la plupart d’entre eux. Il paraît en effet comme « acceptable » aux principales composantes du parti: les intégristes religieux, les faucons en politique étrangère, les conservateurs économiques et le Tea Party.
Le défi du futur candidat : susciter l’enthousiasme et rassembler son camp
Pour l’heure, aucun de ces trois candidats ne suscitent l’enthousiasme. En conséquence, les gros donateurs restent à l’écart. L’objectif que s’est fixé Obama de lever un milliard de dollars apparaît hors de portée pour le parti et les candidats républicains.
Ces élections ne manquent pas à la règle qui veut que les candidats aux primaires du parti opposé au Président sortant soient perçus comme faibles et médiocres.
Ce fut le cas en 1992, lorsque Clinton était candidat chez les Démocrates. La plupart des candidats se révèlent pendant la campagne. Le Parti Républicain est toujours à la recherche du candidat introuvable : un modéré qui suscite l’enthousiasme et soit en même temps capable d’unir le parti le moment venu. L’un des défis pour le candidat choisi par le parti consistera à rassembler son camp, sans heurter la culture anti-establishment du Tea Party.
Patrick Chamorel
Crédit photo, Flickr: davelawrence8
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