OGM : la peur française de l'innovation
Fondapol | 03 mai 2015
OGM : la peur française de l’innovation
Gérard Kafadaroff, OGM : la peur française de l’innovation, Paris, Éditons Baudelaire, 2013, 20€.
Dans « OGM, la peur de l’innovation », Gérard Kafadaroff essaie de tordre le coup à tous les poncifs et anathèmes qui entourent les organismes génétiquement modifiés (OGM). L’auteur dépeint une Europe, averse au risque et aux progrès génétiques, qui tourne le dos à une technologie pourtant porteuse d’espoirs et d’opportunités. Cet ingénieur agronome pourfend également une France nombriliste, renfermée sur elle-même et inapte à s’insérer dans l’économie mondialisée. A contrario « des ayatollahs verts », il lance un appel à l’innovation et à l’audace. Il bat en brèche un à un toutes les critiques et inquiétudes sur l’innovation génétique. De prime abord, l’auteur tend à apporter une précision sémantique. Au très controversé OGM, il préfère le terme plus consensuel et précis de plante génétiquement modifiée (PGM).
Pour prouver l’innocuité des OGM, l’auteur rappelle aux profanes, que les modifications génétiques ont émaillés la vie sur Terre et ont permis à la biodiversité de s’enrichir. Les biotechnologies modernes ne sont qu’un décalque « maîtrisé et plus précis » de ce phénomène naturel. Gérard Kafadaroff égraine ensuite les avantages comparatifs des PGM, et loue notamment leur tolérance à la sécheresse et leurs qualités nutritionnelles améliorées – comme le « riz doré ». Les PGM contribuent en outre à une meilleure protection des rendements agricoles, sans user d’insecticides et permettent par ricochet, une réduction des gaz à effet de serre et une protection accrue de la santé des agriculteurs et consommateurs.
Sus aux « talibans de l’écologie »
Une grande partie de l’ouvrage tend à dénoncer la propagande abusive des « talibans » verts et des « écoterroristes » ; propagande qui empêche l’émergence d’un vrai débat sur les PGM en France. Les avantages des PGM sont constamment passés sous silence avec la complaisance coupable des médias. Mus par le sensationnel, les journalistes obèrent la vérité et l’irréfutabilité scientifique. « La bombe médiatique Séralini » en est la preuve éclatante. In fine, la peur l’emporte toujours sur la raison. Une peur entretenue et consacrée par une fausse bonne idée: le principe de précaution. Véritable « institutionnalisation » de la peur, ce principe valide l’amalgame entre dangers et risques et justifie une « boulimie réglementaire » inhibitrice d’innovation.
À rebours de la doxa médiatique, l’auteur critique une Commission européenne « à la liberté de ton salutaire ». Plus surprenant, Gérard Kafadaroff s’engage dans la défense de « Monsanto », symbole d’innovation et victime d’une véritable « fatwa » cathodique. A l’inverse de l’inertie européenne, le reste du monde connaît un engouement pour les PGM. Le dénigrement français met sous le boisseau des « success stories » comme au Brésil, où rendements et qualités environnementales ont augmenté de concert. Il perçoit dans la PGM, l’expédient pour recouvrer les chemins de la croissance et de la compétitivité.
Un choix mortifère des autorités françaises
L’auteur fustige la pusillanimité des gouvernements français successifs qui glissent dans « l’écologiquement correct ». Une couardise de l’exécutif qui masque en réalité un compromis entre gouvernement et ONG écologistes : la paix sur le nucléaire contre l’abandon des OGM. Des palinodies gouvernementales qui amènent à de véritables contre-sens : ne pas engager une vraie politique d’innovation de l’agriculture, tout en important de grande quantité de PGM du Brésil. Un exercice d’équilibriste qui grève les finances hexagonales d’un côté, tout en empêchant l’émergence et le renouveau de l’agriculture en France. Cette cécité pénalise grandement des filières dynamiques comme l’industrie semencière française, obligée d’exporter des variétés transgéniques sans pouvoir les utiliser elle-même. Une politique d’aveuglement de la France, qui va à rebours de l’intérêt général bien compris. Autre écueil de cette « paranoïa sécuritaire », c’est le recul de la recherche en France. Un manque d’innovation dont pâtissent nos centres de recherches et notre agriculture. Le choix engagé par nos gouvernants pose les jalons d’une fuite des cerveaux et d’un retard irréversible des sciences dures en France. Ces œillères vont faire rater à la France la révolution biotechnologique, pilier indispensable d’une « croissance verte » promue et voulue par tous.
Plaidoyer pour l’innovation
Au-delà d’une vision purement franco-française, Gérard Kafadaroff voit dans les PGM, une contribution pour sortir l’Afrique des nimbes économiques d’un côté, mais aussi lui permettre d’absorber le boom démographique, qui va la frapper dans les cinquante prochaines années. Pendant que France et Europe louvoient, la recherche sur les plantes génétiquement modifiées progresse à grands pas. Les perspectives ouvertes par les PGM laissent entrevoir de grands progrès pour les animaux génétiquement modifiés (AGM) et les organismes vivants artificiels (OVA).
La fin de l’ouvrage est un plaidoyer pour l’innovation. L’auteur s’interroge. Cette Europe rétive au progrès aurait-elle perdu les fondements qui la constituaient? Au banc des accusés, les zélotes du « précautionisme aiguë », pourfendeurs de progrès et « faucheurs d’espérance ». Il enjoint les responsables politiques à faire fi du dogme » anti-progrès » qui irrigue de plus en plus la société, et à lancer de grands projets scientifiques, à même d’oxygéner la recherche et la société. L’auteur plaide pour une « solide politique de vulgarisation scientifique », seule capable d’ancrer la thématique « innovation » dans le quotidien des citoyens.
In fine, Gérard Kafadaroff enjoint l’Etat à desserrer son carcan protecteur – appuyé sur le principe de précaution-, et laisser enfin, la créativité et l’innovation se développer sans entrave. Sans un véritable aggiornamento sur l’innovation, la France tend à voir sa position irrémédiablement se déprécier sur la scène internationale.
Crédits photo : Keith Weller / USDA
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