Un Oscar pour Chimpanzés ?

20 février 2013

Un Oscar pour Chimpanzés ?

Le dernier Disney, version nature, est arrivé !  Après les flamants roses (Les Ailes Pourpres, 2008), les fonds marins (Océans, 2009), les abeilles (Pollen, 2011) et les tigres (Félins, 2011), le cru 2013 nous entraîne dans le monde des chimpanzés.

3 ans de tournage en immersion dans les forêts de Côte d’Ivoire pour retracer l’apprentissage d’Oscar, un bébé chimpanzé devenu orphelin et adopté contre toute attente par un mâle dominant. Aiguillonnés par la célèbre primatologue Jane Goodall, les cameras de Mark Linfield et Alastair Fothergill, déjà à la manœuvre en 2007 pour Un jour sur terre, captent attentivement chaque moment de cette vie quotidienne. Le cérémonial du coucher à l’abri des léopards,  le rituel de l’épouillage, la recherche de nourriture et  le moment du cassage de noix sont autant de scènes immortalisées par le dernier Disneynature.
La tendresse d’une mère pour son petit, la transmission du savoir faire, la lutte pour un territoire, la remise en cause du pouvoir du pouvoir du chef, rien n’échappe à l’objectif vigilant des réalisateurs, entraînant le spectateur dans une rencontre en toute intimité.
Réalisé sans aucun trucage, Chimpanzés n’est pas une fiction. Plus proche du documentaire, le film transporte le spectateur dans le cadre magnifique et vierge où toute trace de civilisation a disparu,  servi par la qualité de ses images, tournées en très haute définition.

Visuellement donc, ce nouveau Disneynature est techniquement irréprochable et l’ambiance sonore de la jungle a également pour mérite d’être particulièrement fidèle, à la fois angoissante et fascinante. Un élément vient cependant perturber la communion potentielle entre le spectacle et le spectateur.


Une voix off…pas assez off

Le film est raconté par une voix off, parfois plaisante, souvent dérangeante.
Comme dans tout documentaire, il y a un narrateur, mais son omniprésence dans Chimpanzés empêche partiellement la magie d’opérer. On imagine sans peine que cette voix a pour objectif de toucher le public habituel de Disney mais finalement, à faire le choix d’un traitement trop enfantin, la portée en est réduite. Le silence de la jungle manque cruellement. Le temps de la contemplation aussi. Le film aurait gagné à laisser plus d’espace au simple spectacle des chimpanzés dans leur quotidien, une réalité qui se suffit à elle-même. L’immersion dans la jungle ivoirienne n’aurait été que plus intense et en ce sens, Chimpanzés pèche par un excès de mis en scène.

Un mimétisme troublant

Poser des mots et des sentiments sur les actes des chimpanzés, donner des petits noms à chacun d’entre eux, tout cela est un parti pris discutable.  Mais si l’un des objectifs était de faire prendre conscience au spectateur de la proximité entre l’homme et le chimpanzé, il est clairement atteint.  Comment ne pas déceler de l’humain dans les regards primates captés en gros plans, dans l’attitude au quotidien de cette espèce animale parmi les plus intelligentes de la planète ? Comment ne pas penser à l’espièglerie de son propre enfant en s’amusant de la facétie du petit Oscar qui désobéit, joue et chahute ? Certaines séquences, sombres, troublent et interpellent, à l’instar de celles évoquant le cannibalisme, le rejet ou l’abandon. Jusqu’où pourraient aller l’être humain pour assurer sa survie ? On en vient a de demander, se rassurer peut être, sur qui nous différencie. Sans nul doute l’explosion intellectuelle. Si l’un descend bien de l’autre, aucune commune mesure entre l’intelligence animale mise au service de sa survie si bien mise en lumière dans Chimpanzés et la créativité de l’homme, capable par exemple de construire une fusée pour explorer l’ailleurs.

Un film témoin

Un questionnement s’impose de fait: comment l’espèce la plus évoluée de la planète peut elle participer activement à sa destruction? Car ce Disneynature ne peut se résumer à un documentaire,  il est aussi le film témoin du combat des défenseurs de l’environnement, notamment celui de Jane Goodall et de son institut, engagé depuis 50 ans dans la lutte pour la sauvegarde de l’espèce. La promotion de Chimpanzés, une occasion unique pour celle qui fait une priorité de la sensibilisation et l’éducation à l’environnement. On peut du coup regretter que la fameuse voix off, et là aurait été son utilité, n’ai pas dit quelques mots du contexte de ce film, et en particulier de la menace qui pèse sur la survie des primates.

Chimpanzés remplit donc partiellement son contrat. Les adeptes du documentaire resteront sans doute sur leur faim, les scènes de violence et de reproduction n’ont pas survécu au montage, jeune public oblige.  Chimpanzés est à aller voir en famille pour ce qu’il est : un Disney merveilleusement réalisé, qui n’a d’autre prétention que de sensibiliser tout en continuant à émerveiller.

Julie Cunat

 

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