Une montagne de défis pour « l’homme fort » du Nigéria
Valentin Weber | 02 juillet 2015
Une montagne de défis pour « l’homme fort » du Nigéria
Par Valentin Weber
2015 restera comme une année majeure dans les livres d’histoire du Nigéria. Pour la première fois un président titulaire, Jonathan Goodluck, a été battu démocratiquement par le leader de l’opposition, Muhammadu Buhari. Le nouveau président. M. Buhari, est prêt à se confronter aux défis du pays. Amadou Sy, de la Brookings Institution, un think tank américain, identifie 3 domaines où des reformes sont probables : la corruption, la gouvernance et la sécurité. (1)
La corruption est omniprésente au Nigéria. Dans le secteur du pétrole, cela a permis aux hauts fonctionnaires et politiciens corrompus de s’enrichir avec de gigantesques montants d’argent. Entre 100.000 et 500.000 barils de pétrole sont volés chaque jour à travers une infrastructure qui remonte jusqu’aux plus hauts rangs de l’Etat. Une corruption plus visible se trouve dans la police, l’éducation et les institutions gouvernementales. Elle a toutefois diminué récemment, grâce au numérique : un site web, comme stopthebribes.net, qui contient une carte qui affiche des incidents de corruption signalés par les citoyens, a eu pour effet que les fonctionnaires réfléchissent à deux fois avant de demander bakchich. Les médias sociaux contribuent également à cette heureuse dynamique : la corruption est souvent filmée et ensuite mise en ligne pour démontrer l’action du fonctionnaire corrompu. (2)
M. Buhari détient une image d’incorruptible : il a renoncé au bling bling accumulé par d’autres fonctionnaires et donne un exemple personnel fort. Il devra désormais aussi nommer des personnages compétents au gouvernement. Selon le juriste constitutionnel Mansara Kogo, M. Buhari doit notamment désigner des acteurs incorruptibles à la tête du Bureau du code de conduite. (3)
L’une des promesses de campagne du président nouvellement élu était d’améliorer la situation de la sécurité dans le pays. Au Nord, Boko Haram, une insurrection terroriste et islamiste, déstabilise le pays en multipliant les enlèvements des enfants et des femmes. Au Sud, dans le delta du fleuve Niger, des gangs criminels attaquent les oléoducs. Plusieurs arguments indiquent que le nouveau président peut stabiliser la situation sécuritaire : M. Buhari est un ancien général qui a imposé la discipline lorsqu’il était président du conseil militaire suprême du Nigéria dans les années 1980 ; son origine d’une ville au Nord et son appartenance à l’islam l’aideront à rassembler les élites musulmanes modérées pour combattre les islamistes. (5)
Cela pourrait toutefois n’être pas suffisant ; selon John Campbell, du Council on Foreign relations, un think tank américain, M. Buhari doit également courtiser les élites civiles pour adopter les lois nécessaires pour battre Boko Haram, or celles-ci gardent un mauvais souvenir de M. Buhari, connu pour ses méthodes expéditives. Il lui reste à prouver que ses déclarations ne sont pas que des paroles creuses.
(3) http://www.voanews.com/content/big-battles-await-president-buhari-in-corruption-fight/2832540.html
(4) http://www.ibtimes.com/nigerian-president-buhari-orders-release-21-million-fight-boko-haram-1966650
(5) http://foreignpolicy.com/2015/04/10/buhari-is-the-man-to-defeat-boko-haram-nigeria/
crédit photo : CC Clara Sanchiz
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