
Créer des fondations pour l'industrie
Yann Le Galès | 06 mai 2013
Article d’Yann Le Galès, parue dans Le Figaro du 6 mai 2013.
Les « pigeons » ont gagné une première bataille. Le 28 septembre 2012 , une poignée de jeunes créateurs et financiers de start-up qui se baptisent les « pigeons » lancent une révolte sur Internet pour protester contre un article du projet d e loi de finances 2013 réformant la fiscalité des plus values réalisées lors de cessions d’entreprises. De nombreuses organisations patronales et professionnelles rejoignent leur mouvement. II faut pourtant attendre le 29 avril 2013 pour que François Hollande renonce à cette réforme et annonce des mesures en faveur des entrepreneurs et des entreprises.
Mais cette première victoire ne suffit pas. Les entreprises tricolores , qui sont les plus imposées en Europe, ont besoin d’autres 29 avril pour recommencer à créer des emplois et à investir. L’industrie est dans une situation critique à cause de longues années d’erreur, constatent Christian Saint-Etienne , professeur titulaire de la chaire d’économie industrielle au Conservatoire national des arts et métiers, et Robin Rivaton , consultant en stratégie, dans la note Le Kapital. Pour rebâtir l’industrie française publiée par la Fondation pour l’innovation politique.
« L’entreprise France» paie les graves erreurs stratégiques commises par les élites françaises. « Sa rentabilité est inférieure d’un tiers à celle de ses compétitrices en Allemagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis, et même en Italie et en Espagne, elle est sous-capitalisée et endettée et ne peut donc conduire seule le nécessaire effort de reconstruction du capital productif du pays », analysent Christian Saint-Etienne et Robin Rivaton.
Ces handicaps sont d’autant plus lourds que « la troisième révolution industrielle, en cours depuis les années 1980 et qui s’accélère depuis les années 2000 est une mutation globale qui est fondée sur une économie entrepreneuriale » , exigeant « des investissements initiaux considérables avec une probabilité de succès très incertaine ». Mais reconstruire l’industrie se heurte à un obstacle majeur Karl Marx et Friedrich Engels ont remporté un tel succès dans l’Hexagone que « le mot capital y est devenu un gros mot ».
Conscients de cette donnée sociopolitique, Christian Saint-Etienne e t Robin Rivaton défendent une « proposition clé et novatrice en droit français. Il faut instaurer en urgence des « fondations de production » permettant d’isoler le patrimoine productif des agents économique de leur patrimoine personnel » Cette innovation permettrait de donner un nouvel élan aux PME et aux entreprises familiales de taille intermédiaire et de refaire de la France une puissance industrielle. Les deux auteurs de l’étude recommandent également de « libérer les canaux du financement des entreprises en favorisant l’émergence d’acteurs assurant une allocation directe de l’épargne ». Cette stratégie est « inverse à celle qu’a choisie l’Etat en décidant d’intermédier l’épargne nationale via la création de la BPI, canal monolithique de financement parasite par les acteurs politiques et administratifs ». Car c’est en abandonnant le Kapital que la France découvrir a enfin les vertus du capital.
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