Le vrai problème : l’immigration ou les immigrés ?
Jacques Garello | 16 mars 2023
Le rapport de Fondapol est remarquable, mais il faut aller plus loin.
Une fois réglée la réforme des retraites, Emmanuel Macron va devoir préparer avec son gouvernement un projet de loi sur l’immigration. C’est ce que prévoit le calendrier du Parlement même si l’actualité peut décaler le débat.
Ce débat risque d’être aussi tendu que celui sur l’âge de la retraite parce que non seulement le Rassemblement national, mais aussi Les Républicains d’Éric Ciotti ont un électorat particulièrement sensible au sujet. Sensibles aussi tous ceux qui vivent dans des villes et des quartiers où la densité d’immigrés est élevée et où le communautarisme est agressif.
Cependant, à la différence de la bataille qui s’achève autour de la réforme des retraites, où n’importe qui a dit n’importe quoi, sans que le système d’où viennent tous les maux soit mis en cause, l’immigration est scientifiquement étudiée dans un rapport de Fondapol rédigé par Dominique Reynié. Il serait souhaitable que toute la classe politique lucide (ce qui exclut la NUPES) s’oblige à le lire et à y réfléchir. Le rapport mesure l’écart qui sépare la France de tous ses voisins européens : un record à nouveau.
Cependant je me permets d’élargir le débat en soutenant que si l’immigration appelle un changement complet de politique, il demeure aussi une interrogation majeure : les immigrés veulent-ils être Français ? Légiférer sur l’immigration sans prendre en compte que de très nombreux immigrés rejettent toute assimilation c’est laisser de côté ce qui est tout aussi important.
La France décrite par le rapport Fondapol
Les chiffres ne manquent pas. Ils ont été collectés avec rigueur scientifique, après examen précis des législations de chaque pays, et recueil de données incontestables sur les mouvements migratoires. Je ne vous communique que l’essentiel de ces informations qui conduisent à un diagnostic très clair de Dominique Reynié : la France est le pays le plus ouvert aux quatre vents de l’immigration parce qu’elle est le pays le plus généreux pour ceux qui s’y installent.
En France, seulement 15 % des étrangers sont expulsés contre 43 % dans la moyenne européenne. Ceux qui ont été condamnés pour des délits ne sont pas expulsés. Le regroupement familial est pratiqué, mais souvent ignoré ailleurs. L’immigration actuellement dominante est celle d’Africains subsahariens, leur logement, leur emploi et leurs compétences n’ont aucune importance. Pourquoi choisir la France ? C’est le pays le plus généreux : l’aide médicale d’État permet aux étrangers de bénéficier de soins gratuits. Ils peuvent solliciter un permis de séjour pour être soignés en France – on recense des Japonais, des Américains, des Allemands, etc. Les immigrés accèdent très vite aux largesses de l’État providence (dont on sait qu’il absorbe un bon tiers du budget), et connaissent très vite leurs « droits sociaux ».
Le ménage « monoparental » a une fréquence élevée, les enfants sont nombreux et les Caisses d’Allocations Familiales apportent toute l’aide voulue et peut-être recherchée. Enfin, la naturalisation obéit à la loi du sol et elle est obtenue au bout de 5 ans. C’est l’échéance la plus courte en Europe puisqu’en général c’est un séjour (sans histoire) de 8 à 10 années suivant les pays qui est exigé. Le rapport est une mine de découvertes, sa lecture donne les mêmes sensations qu’un roman.
La difficulté de l’assimilation
La tolérance et la générosité sont souvent mal payées de retour.
Il y a certes des liens entre le fait que la France est ouverte aux quatre vents et le fait que l’assimilation est difficile. Ces liens ont été par exemple exprimés par David Lisnard et Naïma M’Faddel :
« Le nombre est problématique : s’il est possible d’assimiler des individus, il n’est pas possible d’assimiler des peuples qui privilégient toujours leur mode de vie traditionnel par rapport au nôtre. Et c’est bien là que les politiques d’immigration massive, qui favorisent la ghettoïsation, sont désastreuses pour notre cohésion nationale ».
Toutefois je ne crois pas que le nombre soit l’unique obstacle à l’immigration. Indirectement il est fait ici référence à ce que font par exemple les Allemands : ils ont assimilé plus de trois millions de Turcs et plus de la moitié sont aujourd’hui de nationalité allemande. Mais ils n’ont pas créé des ghettos : ils ont assigné à résidence les arrivants et les ont obligés à apprendre la langue de Goethe. Peu ou prou les immigrés ont été amenés à abandonner leur mode de vie traditionnel. Il faut aussi se rappeler que rien n’est plus favorable à l’assimilation que le creuset de l’entreprise : travailler ensemble permet d’unir des personnes venues de toutes origines. Voilà l’un des secrets du rêve américain, d’ailleurs bien compromis aujourd’hui avec les communautarismes agressifs.
Mais en France non seulement ces modes d’assimilation ne sont pas pratiqués, et les ghettos existent, mais tout au contraire l’école et la culture font défaut. Parler français : mais les écoliers français eux-mêmes n’en sont plus capables quand les enseignants ont pour programme de leur apprendre à planter des arbres, à colorier des dessins tout préparés, quand ce n’est pas (comme bientôt) à connaître les secrets de l’éducation sexuelle.
Je suis petit-fils d’immigrés italiens venus de la Ligurie et installés en Provence. Mes grands-parents s’interdisaient de parler italien en présence des enfants. Évidemment ils étaient aussi catholiques et la religion ne leur imposait pas sévèrement un mode de vie. Mais aujourd’hui la culture française existe-t-elle ? Elle donne le spectacle de la vulgarité, de la facilité.
Molière est-il enseigné quelque part ? En ce moment les télévisions diffusent de la propagande féministe, du misérabilisme, de l’écologisme. Ces spectacles peuvent-ils élever le capital humain ? Je suis libéral mais conservateur parce que je pense que les êtres humains ne peuvent vivre sans référence à quelque valeur spirituelle ou morale, et il faut des années pour y accéder – et on manque certainement d’« influenceurs » comme Charles de Foucauld.
Il n’est pas jusqu’aux philosophes à la mode, aux historiens officiels, et même au président de la République pour raconter aux immigrés de la deuxième ou troisième génération tout le malheur et tous les crimes que la France aurait commis en deux siècles de colonisation.
Je faisais allusion à l’entreprise et au travail pour aller vers l’assimilation, mais cela suppose d’une part que le chômage soit faible au lieu d’être subventionné ; et d’autre part que l’on ait appris à l’école le sens du travail, du respect des autres, de la discipline et de l’exactitude. Il est vrai que nos gouvernants veulent réinventer le service militaire mais l’école, le collège et le lycée devraient être des foyers de convivialité, de dépassement et d’épanouissement.
J’espère vivement que le rapport Fondapol permette de passer d’une immigration massive à une immigration « choisie » (belle formule). Mais il faut aussi s’occuper sérieusement de faire revivre en France les principes de civilisation qui sont aujourd’hui oubliés. Ce souhait va-t-il rencontrer la volonté de nos réformateurs ?
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