Protestantisme : une étude met au jour les recompositions à l’œuvre en France

Malo Tresca | 31 mars 2021

Présence accrue dans l’espace public, croissance des évangéliques, engagement affirmé dans les débats sociétaux… La Fondation pour l’innovation politique a publié, mardi 30 mars, une étude du sociologue Jean-Paul Willaime, décryptant les récentes évolutions et prises de position du protestantisme dans l’hexagone.

Analyser les ressorts et les enjeux de « l’importante reconfiguration » qu’a connu, ces dernières années, le protestantisme français. Mardi 30 mars, la Fondation pour l’innovation politique – think tank qui se présente comme libéral et progressiste – a publié une étude du sociologue Jean-Paul Willaime, directeur d’études émérite à l’École pratique des hautes études (PSL-Sorbonne), intitulée Les protestants en France, une minorité active.

Dans ce document, le spécialiste analyse notamment les nouvelles dynamiques à l’œuvre au sein de cette galaxie confessionnelle, à l’aune de l’union, en 2013, des Églises réformées et luthériennes, ou encore de la croissance des évangéliques sur le territoire« Non sans susciter quelques tensions, ces évolutions ont accru le rôle de la Fédération protestante de France (FPF), laquelle a pour mission de représenter l’unité plurielle du protestantisme, y compris des évangéliques, devant les pouvoirs publics », relève-t-il dans cette nouvelle étude.

Risque de « bipolarisation »

Alors qu’une crise majeure avait secoué en 2015 l’instance, ouvrant la voie à la création parallèle du Conseil National des Évangéliques de France (Cnef) – dans le sillage, alors, de la décision de l’Église Protestante Unie de France (EPUdF) d’autoriser la bénédiction des couples de même sexe –, Jean-Paul Willaime pointe encore le risque actuel d’une « bipolarisation du protestantisme français », corollaire selon lui de la volonté affirmée du Cnef de « promouvoir l’identité propre du protestantisme évangélique ».

Alors que les croyants affiliés aux nombreux courants de ce dernier représentent aujourd’hui près de 50% des protestants français – contre 10% dans les années 1960 –, le spécialiste note un « déplacement du centre de gravité du protestantisme du pôle luthéro-réformé vers le pôle évangélique ». Un phénomène qui se manifeste, au sein de la FPF, « non sans susciter quelques tensions et la nécessité de repréciser pour les uns et les autres le sens du lien fédératif ».

Engagements sociétaux

Bioéthique, liberté de culte, écologie… Si le protestantisme demeure relativement méconnu en France – malgré le large écho rencontré notamment, en 2017, lors des grands événements de commémoration des 500 ans de la Réforme – Jean-Paul Willaime insiste encore sur son rôle accru d’interpellation des autorités, et de l’opinion publique, sur divers sujets sociétaux.

« Le protestantisme assume une présence affirmée dans l’espace public et refuse une laïcité conçue comme une neutralisation-invisibilisation religieuse de la vie sociale », précise-t-il, avant de citer plus particulièrement « l’opposition vigoureuse », ces derniers mois, de la FPF au projet de loi confortant le respect des principes de la République, lancé par le gouvernement pour lutter contre le séparatisme en France.

« Si (les protestants) acceptent d’endosser le rôle de « vigies » (de la République) que leur a assigné le président (Emmanuel Macron, en 2017, NDLR), ce n’est ni pour devenir des accompagnateurs attestataires des pouvoirs en place, ni, au contraire, pour se transformer en pourfendeurs systématiques », théorise-t-il enfin, « s’ils acceptent d’endosser ce rôle, c’est parce que leur théologie leur enjoint de le faire ».

Lisez l’article sur la-croix.com.

Jean-Paul Willaime, Les protestants en France, une minorité active (Fondation pour l’innovation politique, mars 2021).

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