Attaque contre Israël : on vous explique ce qu'est le Hamas et ce que veut ce groupe terroriste

La rédaction de La Dépêche | 10 octobre 2023

DECRYPTAGE. Attaque contre Israël : on vous explique ce qu'est le Hamas et ce que veut ce groupe terroriste.

Le Hamas – Harakat a Moukawama al islamya, « mouvement de la résistance islamique » – est officiellement né en décembre 1987, au début de la première intifada, «  guerre des pierres  » contre l’occupation israélienne à Gaza et en Cisjordanie. Classé « terroriste » par les États-Unis, l’Union européenne, le Canada ou le Japon, il est issu du mouvement sunnite Al-Moujamma al-Islami, association créée par le cheikh Ahmed Yassine « pour faire du social et prier », mais il est avant tout une émanation des Frères musulmans dans les territoires palestiniens occupés.

Frères musulmans et jihad

Dans la lignée du jihad professé par l’Egyptien Sayyid Qobt – théoricien des Frères exécuté en 1966, sous Nasser – le Hamas du cheikh Yassine se déclare dès ses débuts pour la lutte armée, en tant qu’aile paramilitaire palestinienne du mouvement intégriste.

Sous la direction de son fondateur et guide spirituel – vieil homme aveugle cloué dans un fauteuil roulant – il refuse de fait toute négociation avec Israël. Ne reconnaissant pas « la légitimité de l’entité sioniste », il revendique a contrario la création d’un Etat palestinien islamique sur tout le territoire israélien.

Paradoxalement, son essor sera aussi soutenu par les «  faucons  » de Tel Aviv afin d’affaiblir l’OLP de Yasser Arafat… Le Hamas se construit ainsi en opposition frontale aux accords d’Oslo mettant fin à l’intifada, en 1993.

Le dynamitage de ces derniers par Benyamin Netanyahou et la droite israélienne après l’assassinat du Premier ministre Yitzhak Rabin, en novembre 1995, par un extrémiste religieux juif, lui facilitera la tâche. Le désenchantement des Palestiniens nourri par l’impuissance de l’Autorité palestinienne et ses scandales de corruption le serviront aussi.

Financé par les Saoudiens et les Qataris, « il s’ingénie à monter une structure sociopolitique puissante et efficace dans les territoires occupés ce qui lui vaut un soutien populaire important. Après la première guerre du Golfe, comme le Hamas s’était déclaré contre Saddam Hussein – à la différence d’Arafat – une grande partie des fonds saoudiens allant à l’OLP lui sont en effet attribués », rappelle Alain Rodier, du Centre Français de recherche sur le renseignement (CF2R).

Attentats suicides

À partir de 1993, le Hamas multiplie les attentats suicides contre Israël, frappant le centre de Jérusalem en 1997. Hier comme aujourd’hui, l’objectif est de déclencher des répressions meurtrières, l’image du martyr devant lui gagner les opinions publiques arabes. En 2021, la Fondation pour l’innovation politique estimait à 908 le nombre de ses victimes, avant le lourd bilan de ce week-end.

La prise d’otages n’est pas non plus une nouveauté : en 2006, il avait capturé le caporal Gilad Shalit, citoyen franco-israélien, relâché en 2011 contre 477 prisonniers.

De Yassine à Haniyeh

Arrêté en 1989, le cheikh Yassine est condamné à la prison à vie en 1991 et libéré à la faveur d’un échange en 1997. Après l’attentat-suicide du 19 août 2003 à Jérusalem, il échappe à un premier raid de représailles mais pas au second, en mars 2004. Le Hamas se heurte alors aussi de plus en plus violemment au Fatah, branche majoritaire de l’OLP, après avoir remporté les élections à Gaza, en 2006. Le 13 octobre 2022, quatorze factions palestiniennes – dont le Fatah et lui — signeront finalement à Alger un accord de réconciliation.

Aujourd’hui, le Hamas est dirigé par Ismaël Haniyeh, ancien Premier ministre palestinien de 2006à 2014, Yahya Sinouar, lui aussi libéré après un échange, étant son chef dans la bande de Gaza, « mais le pouvoir réel est collégial », pointe Alain Chouet, ancien chef du renseignement de sécurité à la DGSE. Avant d’expliquer la singularité de ce terrorisme sunnite soutenu par l’Iran chiite.

Instrument de l’Iran

« Les Iraniens ne voulaient pas laisser aux Saoudiens et aux Qataris la carte de la résistance à Israël. Dans un premier temps, ils ont créé le Jihad islamique afin de challenger le Hamas. Ensuite, il y a eu une spirale des financements entre l’Arabie saoudite, l’Iran et… le Qatar, allant du simple au décuple en dizaines de millions de dollars. Mais après la victoire des Frères musulmans en Égypte, en 2012, Riyad a commencé à couper les vivres, puis le Qatar, après l’éviction de l’émir Hamad par son cousin, en 2013. L’Iran a alors pris la main auprès du Hamas et Téhéran joue maintenant avec lui la carte de « l’irréversible » en voulant réactiver la haine entre les sunnites et Israël, casser la dynamique de rapprochement de l’État hébreu avec l’Arabie saoudite et le Qatar. »

Avec quelles forces ? Si on comptait un millier de combattants il y a 20ans, « le réservoir est inépuisable avec deux millions et demi de personnes enfermées dans un territoire de 40 km sur 6 à 12 de large », estime Alain Chouet.

 

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Dominique Reynié (Dir), Les attentats islamistes dans le monde 1979-2021, Fondation pour l’innovation politique, septembre 2021.

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