L'immigration : la gauche danoise verrouille

Guillaume Roquette | 10 janvier 2023

Ce matin, direction le Danemark, un pays gouverné par une drôle de gauche. Guillaume Roquette, directeur de la rédaction du Figaro Magazine, revient sur la nouvelle note de la Fondation pour l'innovation politique, "La politique danoise d'immigration : une fermeture consensuelle".

Oui, les législatives du 1er novembre dernier ont reconduit au pouvoir une majorité social-démocrate, rien de très original pour un pays scandinave. Mais ce qui l’est davantage, c’est que cette gauche réformiste, dirigée par une première ministre de 45 ans, pratique une politique migratoire que ne désavouerait pas le Rassemblement national.

Il est devenu très difficile d’obtenir un visa pour le Danemark et les conditions de naturalisation sont draconiennes, tout comme les règles du droit d’asile. Le gouvernement négocie actuellement avec le Rwanda pour que tous les candidats à l’asile aillent d’abord dans ce pays pour faire instruire leur dossier. L’idée est qu’ils ne puissent pénétrer sur le sol danois que si leur demande est acceptée.

Cette politique est-elle très critiquée dans le pays ?

Non, elle fait l’objet d’un consensus assez large entre la gauche et la droite, cette dernière menait d’ailleurs la même politique quand elle était aux affaires. Au-delà de leurs divergences politiques, les Danois sont d’accord pour limiter au maximum l’immigration afin préserver leur modèle d’Etat providence. Et ce n’est pas seulement une question d’argent, il ne s’agit pas seulement de réserver les aides sociales aux nationaux. Comme l’explique le think tank français Fondapol qui vient de publier une note sur le sujet, l’objectif est surtout de préserver l’homogénéité politique et culturelle du pays.

Vue de France, cette entente entre droite et gauche sur un sujet aussi clivant apparait totalement contre-nature. Mais les Danois ne trainent pas la même culpabilité post-coloniale que nous, ils ne voient rien d’immoral à imposer à leurs nouveaux arrivés des règles d’intégration très strictes. Par exemple, les sanctions sont plus sévères pour les actes de délinquance commis dans les quartiers à forte population immigrée. En France, on jugerait cela discriminatoire mais au Danemark on considère que c’est une incitation à vivre « à la danoise ». De la même façon, les statistiques ethniques ne choquent personne là-bas : tout le monde a accès aux chiffres du chômage ou au montant des aides sociales, selon la nationalité d’origine des bénéficiaires.

Il y a une autre question qu’on peut se poser : comment ce pays arrive-t-il à verrouiller ainsi l’asile ou le regroupement familial alors qu’il est membre de l’UE, sachant que les institutions européennes sont très sourcilleuses sur les droits des immigrés. La raison est historique : les Danois ayant voté non au premier référendum sur le traité de Maastricht, ils ont gagné le droit de s’exempter de certaines contraintes européennes. Et apparemment ça leur va très bien.

 

Retrouvez l’article sur radiofrance.fr

Commentaires (0)
Commenter

Aucun commentaire.