Comment répondre à la crise démocratique ?

Guillaume Tabard | 25 octobre 2020

À l’heure du bilan, ce sera une des questions adressées à Emmanuel Macron: comment a-t-il répondu à la crise démocratique ? L’a-t-il atténuée ou aggravée ? À s’en tenir au nouveau baromètre de la protestation électorale FondapolLe Figaro, la réponse est sans appel : jamais les Français n’ont été autant tentés par ce que Dominique Reynié qualifie de «dissidence électorale», que ce soit par un vote qualifié de protestataire, principalement lepéniste ou mélenchoniste, ou par l’abstention.

Partons d’un constat : le candidat Macron se faisait fort de sortir l’action politique de l’impuissance à laquelle elle semblait condamnée en l’arrachant aux clivages artificiels dans lesquels il voyait la cause de cette paralysie. Regardons la réalité : depuis trois ans, le pays a été secoué par des crises successives ayant profondément éprouvé le pays, avivé ses divisions, ranimé ses craintes, ses inquiétudes, ses colères et accru la distance avec «les» politiques. «Gilets jaunes», retraites, Covid, islamisme : la France passe de traumatisme en traumatisme. Le macronisme subit ses crises sans être responsable de la plupart d’entre elles. Et se retrouve ainsi victime à son tour d’un mal qu’il avait diagnostiqué.

La déprime nationale, qui se traduit par l’absence de tout pôle de reconstruction cohérent ou majoritaire, interdit toute anticipation d’un scénario politique. La notion de «dégagisme», à la mode ces dernières années, est elle-même floue. On a pour habitude, et cette enquête s’inscrit dans cette logique, d’identifier les votes Rassemblement national et La France insoumise à l’expression politique de ce «dégagisme» et à du «populisme», ce dernier qualitatif ayant une connotation fortement péjorative. Mais globaliser, c’est nier une autre réalité : ces votes ont une dimension d’adhésion positive équivalente à celle des autres partis. Tandis que des votes supposés «inclusifs» ont aussi leur part protestataire contre des sortants ou des systèmes en place. De ce point de vue, le vote écologiste aux municipales a eu cette dimension dégagiste, voire populiste. Ce fut aussi un des ingrédients du vote macroniste de 2017 lequel, par définition, ne vaudra pas en 2022 pour un pouvoir sortant.

L’abstention aussi est composite. Elle a sa part structurelle incompréhensible. Elle a sa part conjoncturelle liée à la crise sanitaire ; on l’a constaté aux municipales. Mais elle a aussi sa part de dissidence, symptôme d’un échec imputable à tous les partis, y compris les plus protestataires. L’abstention est ainsi un défi aux populistes plus que leur alliée. De même il est significatif que ce soit au sein de l’électorat le plus contestataire, sceptique ou critique à l’égard du «système» que se comptent le plus grand nombre de partisans d’un pouvoir direct des citoyens. Il n’est pas sûr que la première Convention citoyenne soit une réponse suffisante à cette aspiration. Le chantier de la rénovation des pratiques démocratiques sera en tout cas un des piliers nécessaires de la prochaine campagne présidentielle.

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